Dr François Michel
Dermatologue
Thiers
Le LASER en douceur
Paradoxalement, c’est à la conquête spatiale que nous devons la photomodulation LED qui est devenue emblématique des technologies esthétiques douces. Tout commence quand la NASA découvre que les plaies cicatrisent difficilement en apesanteur, comme cela avait été du reste observé dans les sous-marins. On va alors se tourner vers les infrarouges connus depuis depuis longtemps pour leurs propriétés cicatrisantes et anti-inflammatoires. Dans ce domaine, les premiers brevets datent de 1965 et on estime que 30 millions de personnes ont été traitées ainsi, surtout en Asie. Précisons encore que les lampes dites infrarouges qui font référence, émettent en réalité dans un spectre allant du bleu aux infrarouges proches, incluant donc le jaune et le rouge. Enfin, il est important de savoir que ces lampes infrarouges avaient démontré dans les centres de recherche les plus prestigieux, des propriétés anticancéreuses et anti-oxydantes.
C’est dire si le recul et l’innocuité étaient démontrés et, pour l’anecdote, on peut signaler que le soleil du matin est plus riche en infrarouges qui tendent ainsi à nous protéger de l’agression des ultraviolets pendant la journée.Or à l’époque de la conquête spatiale, les diodes électroluminescentes (ou LED) venaient d’apparaître, qui éclairent sans chauffer, ce qui permet d’utiliser l’énergie lumineuse et ses propriétés biologiques sans aucun risque de chaleur excessive.
La deuxième idée a alors été de faire fonctionner ces LED en mode pulsé
C’est à dire avec une succession de flash de quelques millièmes de secondes, cette pratique ayant permis d’améliorer de façon considérable l’efficacité des lasers dermatologiques.Les essais ont effectivement retrouvé toutes les propriétés bénéfiques des « infrarouges » mais avec, en prime, un effet anti-ride. La photomodulation était née. Le premier appareil conçu, qui émet en lumière jaune, a donné lieu à une étude montrant l’amélioration de 90% des personnes traitées, avec une action sur la texture cutanée chez 87% des sujets, sur les rougeurs chez 65%, sur l’hyper-pigmentation due au soleil chez 62% et sur les ridules péri-occulaires chez 56%.
Restait à évaluer non pas le pourcentage de sujets répondeurs mais l’ampleur de la réponse.
C’est ce qui a été fait avec une LED émettant en couleur rouge et sur un groupe de 53 personnes. La diminution moyenne de profondeur des rides était de 24,6 microns mais avec une diminution de 226,5 microns dans un cas, soit presque 10 fois plus. Cela montre qu’il existe des sujets très bons répondeurs qui permettront aux constructeurs d’appareils de montrer des résultats photographiques spectaculaires sans commune mesure avec le résultat moyen qui relève plutôt du coup d’éclat avec « défroissage », ce qui est tout de même remarquable pour une technique totalement dénuée de risques. La photomodulation LED avait alors la voie toute tracée dans le secteur de l’esthétique douce et de fait, on vient de voir apparaître un modèle conçu pour les particuliers ressemblant à une lampe de poche tandis que un grand groupe international de cosmétologie vient de conclure un marché avec le constructeur du premier appareil, probablement afin de le diffuser dans les instituts de beauté du monde entier.
En était-ce fini de la vocation médicale initiale de cette technique ?
Eh bien non car des études ont montré une efficacité intéressante sur l’acné, et d’autres sont en cours sur des maladies cutanées inflammatoires telles que le lichen, ainsi que sur une redoutable maladie ophtalmologique, la dégénérescence maculaire liée à l’âge. Mais l’étude la plus spectaculaire est sans doute celle réalisée sur les suites de radiothérapie pour cancer du sein avec une disparition quasi totale des suites inflammatoires et on mesure l’apport considérable à venir dans les services de radiothérapie. Enfin, dans la dermatologie quotidienne, l’efficacité sur les pigmentations post-inflammatoires, les rosacées et les cicatrices d’acné est largement vérifiée avec l’énorme avantage de pouvoir traiter sans risque les personnes dont la peau est foncée, ce qui n’est pas toujours le cas avec les méthodes agressives.
En conclusion, la photomodulation LED ouvre la voie à des traitements fondés sur une action bénéfique directe et non pas sur une agression induisant une réparation comme c’était le cas avec toutes les techniques dermatologiques (laser, lumière pulsée ou radiofréquence) qui chauffent la peau pour être efficaces. Mine de rien, il s’agit d’une petite révolution culturelle qui suscite encore la perplexité de nombreux médecins qui ont du mal à y croire d’autant que le panel d’utilisation allant de la petite ridule aux suites de radiothérapie est tout aussi déconcertant. Il n’en reste pas moins qu’avec des appareils sérieusement mis au point, les résultats sont là et la photomodulation LED n’a pas fini de faire parler d’elle.