Pr Marie-Thérèse Leccia
Dermatologue
CHU Grenoble
Le mélanome est un problème majeur de santé publique. Il s’agit en effet du cancer dont le nombre de cas a le plus augmenté durant les 20 dernières années. Plus de 90% des mélanomes sont diagnostiqués au stade de tumeurs primitives présentes sur la peau qui, après traitement chirurgical, ont un pronostic excellent pour la majorité d’entre elles. Ce cancer cutané nécessite cependant une surveillance dermatologique à vie.
Au stade métastatique (lorsque le « mélanome malin« dissémine sur d’autres sites cutanés, dans les ganglions ou dans d’autres organes) le contrôle de la maladie devient alors plus difficile.
Le traitement chirurgical reste la référence lorsqu’il est réalisable mais en cas de métastases multiples un traitement général par chimiothérapie ou immunothérapie devient nécessaire. Cependant, l’efficacité des chimiothérapies « classiques » (dacarbazine, fotemustine) et des immunothérapies reste très limitée puisqu’elles ont des taux de réponse de l’ordre de 15%. Il est donc urgent de trouver de nouveaux traitements pour les patients, souvent jeunes, atteints de mélanomes métastatiques.
Au cours de l’année 2011, le paysage thérapeutique s’est considérablement modifié avec l’arrivée de nouvelles molécules d’immunothérapie et des thérapies dites ciblées.
Son développement dépend de l’équilibre établi entre les cellules cancéreuses et le système immunitaire. Depuis plusieurs années différentes approches d’immuno-modulation ont été tentées. L’ipilimumab (YervoyR, laboratoires Bristol Myers Squibb) est une molécule d’immunothérapie qui a démontré, pour la 1ère fois, une amélioration de la survie chez les patients atteints de mélanome malin.
Tous les patients atteints de mélanome métastatique ne répondent cependant pas à ce traitement, qui peut induire par ailleurs des effets secondaires importants, et la priorité est aujourd’hui mise sur la recherche de marqueurs prédictifs de réponse et sur la prise en charge attentive des effets secondaires. L’ipilimumab est actuellement en attente de commercialisation. Un nouvel essai international avec cette molécule comparant les doses de 3 et 10 mg/Kg est également en cours.
La majorité des mélanomes présentent une activation anormale de voies cellulaires impliquées dans la prolifération des cellules cancéreuses qui constituent aujourd’hui de nouvelles cibles thérapeutiques.
Ainsi, environ 1 patient sur 2 présente une mutation BRAFV600E et le traitement par le vémurafénib, molécule inhibant sélectivement cette mutation, a montré une amélioration significative de la survie des patients atteints de mélanome métastatique. La réponse est rapide et spectaculaire mais il existe des rechutes après 6 à 8 mois de traitement en moyenne suggérant l’émergence de mécanismes de résistance.
Le vémurafenib ne peut par ailleurs être donné qu’aux patients porteurs de la mutation car il est inefficace voire délétère chez les patients dont le mélanome n’est pas muté sur BRAF. Certains des mécanismes de résistance ont été identifiés et des essais cliniques en cours prometteurs combinent plusieurs types d’inhibiteurs afin d’augmenter la durée de réponse et de limiter l’émergence des résistances. Le vémurafenib (ZelborafR, laboratoires Roche) est commercialisé en 1e ligne ou plus pour le traitement des mélanomes métastatiques présentant la mutation BRAFV600E.
La mise en place dans les hôpitaux de plateformes de génétique moléculaire, avec le soutien de l’Institut National du Cancer (Inca), aideront dans les prochaines années à définir précisément le profil des patients et à évaluer la place, l’efficacité et la tolérance des nouveaux traitements.