Pr Jean-Claude Béani
Dermatologue
CHU Grenoble
La photoprotection de l'enfant doit être l'objet d'une attention particulière.
L’enfance paraît en effet être une période cruciale pour le développement ultérieur des cancers cutanés qu’il s’agisse du mélanome mais aussi probablement de certains carcinomes, les plus fréquents de tous les cancers. Par ailleurs, un sujet reçoit la moitié de la dose lumineuse de sa vie pendant l’enfance et l’adolescence, et la dose de lumière annuelle reçue dans cette tranche de vie est le double de celle d’un adulte.
Une étude française conduite dans le sud de la France montre que 50% des enfants de 3 à 12 ans passent plus de 6 heures par jour à l’extérieur et que 90% d’entre eux avaient eu des coups de soleil. Si la plage ou la piscine représentent certes de hauts lieux d’exposition, c’est au cours des jeux à l’extérieur et de la pratique de sport que l’enfant passe le plus de temps dehors.
L’enfance est également l’époque où se créent les comportements futurs. Les campagnes de sensibilisation paraissent avoir beaucoup de limites dans leur efficacité et seule l’éducation , face au soleil, comme pour les autres fondamentaux de la vie, pourrait être efficace. Malheureusement les études comportementales des parents pour leur enfants montrent que le chemin est encore long pour espérer qu’un jour les bons comportements soient ancrés dans les murs.
Le risque le plus important et à gravité immédiate pour un enfant en très bas âge, est le coup de chaleur non pas dù aux Ultraviolets (UV) solaires mais aux infra-rouges du spectre solaire. Pour l’éviter, il ne faut jamais laisser un nourrisson au soleil direct bien sûr, limiter la durée de l’exposition, éviter le séjour extérieur les jours fortement ensoleillés (par exemple à la plage !) et en été, éviter les expositions aux heures où l’émission lumineuse est la plus forte c’est-à-dire entre 12 et 16 heures (heure de la montre de deux heures en avance sur l’heure solaire l’été en France), ne pas trop le couvrir et le réhydrater régulièrement.
Pour les enfants plus grands, il est difficile et probablement dangereux pour d’autres fonctions physiologiques d’exclure les séjours à l’extérieur !
Telles que dites ci-dessus, les principales expositions relèvent des activités mêmes de l’enfant. Ceci débouche sur deux déductions évidentes. La première est que comme cela a été fait en Australie, il serait déjà souhaitable que les cours d’école soient équipées d’espaces ombragés ! La seconde est que les parents ne doivent pas limiter pour leurs enfants (comme pour eux-mêmes au demeurant !) les mesures de photoprotection aux vacances à la mer ou au bord d’une piscine, mais les appliquer à toutes les activités extérieures.
La photoprotection de l’enfant passe par le respect le plus strict possible de l’évitement des heures d’exposition les plus « chaudes » et une photoprotection vestimentaire rigoureuse. Sans tomber dans le travers de la baignade en tee-shirt, dès celle-ci terminée, l’enfant doit se remettre à l’ombre ou remettre des vêtements qui couvrent le tronc et le haut des cuisses ainsi qu’une casquette ou un chapeau. Les nouveaux vêtements à textile protecteur contre le soleil peuvent avoir un intérêt, mais attention qu’ils ne laissent pas dans l’esprit de l’enfant le message que le risque solaire est ainsi contrôlé et donc que l’on peut s’exposer à vau-l’eau.
Les produits de protection solaire ne doivent être qu’un appoint pour les zones mal protégées par les vêtements.
L’agence de sécurité sanitaire des produits de santé a émis des recommandations qui définissent les qualités que doit avoir un tel produit : une protection harmonieuse contre tous les Utraviolets (le ratio entre la protection UVB et la protection UVA inférieur ou égal à 3, et une extension de la protection aux UVA les plus longs par l’indication de la longueur d’onde critique qui doit être supérieure ou égale à 370 nanométres), une détermination des indices par des méthodes validées (facteur de protection solaire couramment appelé FPS ou SPF pour les UVB, et pigmentation immédiate à lecture retardée appelée PPD pour les UVA), l’abandon à terme des indices au profit de classes au nombre de quatre, faible, moyenne, haute ou très haute (pour chacune des classes, les critères de protection harmonieuse doivent bien sûr être respectés). Les produits qui répondent aux exigences de ces recommandations indiquent dès aujourd’hui sur leur emballage ces éléments : indice SPF ou FPS, indice PPD, longueur d’onde critique et , par déduction de ces valeurs, classe d’appartenance.
Le choix pour un enfant doit se tourner le plus souvent vers les produits de classe haute et, lors d’expositions très intenses (séjours en montagne ou sous les tropiques), vers les produits de classe très haute. Le choix de la forme galénique dépend de la zone d’application : les crèmes sont très bien adaptées pour le visage, le sont moins pour le corps pour lequel sont préférés, pour les qualités d’étalement, les laits.Le produit doit être très régulièrement renouvelé en particulier après un bain et répétons-le, son usage ne doit pas se limiter aux vacances d’été mais s’étendre à toutes les situations, tout au long de l’année où l’enfant est à l’extérieur un jour ensoleillé. Pour les enfants très sensibles au soleil, atteints de pathologie solaire ou ayant parmi leurs ascendants ou leur fratrie, des sujets ayant développé un mélanome, des conseils de photoprotection doivent être pris auprès d’un médecin.
Les « pilules » supposées protectrices contre le soleil, à base en particulier d’antioxydants, sont formellement à bannir chez l’enfant.
Enfin, un enfant ne doit jamais séjourner au soleil sans porter des lunettes de protection solaire efficace.